« Celui qui a atteint son but a manqué tout le reste »
adage zen
J’aime beaucoup les adages zen si simples et si profonds à la fois. Dans notre société focalisée sur les objectifs le plus souvent à court terme et obsédée par les résultats, il est bon de se rappeler cet adage.
Mais qu’avons-nous manqué lorsque justement nous avons atteint notre but qui a occasionné tant d’investissement personnel ? Posons-nous d’abord la question «comment» avons-nous atteint notre but : rapidement ou lentement, avec une débauche de ressources ou des moyens écologiques, seul.e ou collectivement, en déroulant une procédure ou en innovant, en mode automatique ou en conscience ?
« Une autre posture consiste à faire le chemin vers son but en étant ouvert aux imprévus et aux synchronicités »
Le plus souvent, nous avons appris à arriver à destination par l’effort, la concentration, la volonté et donc avec un champ de conscience étroit et focalisé. Cela nous permet de filtrer les informations utiles et de ne pas tenir compte des évènements hasardeux, des rencontres fortuites qui ne servent pas immédiatement notre objectif. C’est ce qu’on appelle l’efficacité ! Or en avançant en ligne droite vers l‘objectif, ces dizaines voire centaines de micro-événements, de circonstances inattendues, de nouveaux paysages qui ne retiennent pas notre attention sont perdus, inexploités, sous-estimés, alors que c’est une source d’inspiration créatrice, d’éveil à la réalité. En effet, nos plans et nos projets, aussi sophistiqués et structurés soient-ils, peuvent s’avérer déphasés avec les données brutes du réel en constante évolution.
Une autre posture consiste à faire le chemin vers son but en étant ouvert aux imprévus et aux synchronicités, ces coïncidences qui dansent avec le sens, riches de possibilités qui nous ouvrent de nouvelles pistes encore inexplorées.
C’est de cette manière que fonctionne la sérendipité, cette ouverture malicieuse de l’esprit qui nous fait trouver «par accident» une solution que nous n’avions pas cherchée, comme la tarte des sœurs Tatin, la découverte de la pénicilline ou l’invention du post-it. Dans notre vie, cela peut se manifester sous la forme d’une rencontre au coin de la rue d’un ancien ami ou collègue qui va nous ouvrir les portes d’une opportunité inespérée. Personnellement, c’est avec cet état d’esprit que j’ai trouvé une maison ancienne restaurée au coeur d’un village d’artistes du Gard alors que je cherchais un appartement au centre ville de Rennes. Mon projet d’installation a été détourné par une intuition aussi subite que féconde.
Cet état d’ouverture et d’éveil actif est d’ailleurs la clé de la réussite des créateurs de start-up qui bien souvent réorientent leur projet et leur objectif en chemin. L’idée de départ n’est en sorte qu’un déclencheur pour se mettre en mouvement et collecter des ressources. Au fil de l’avancée du projet, de nouvelles données comme les réactions du marché, des nouvelles tendances, des besoins négligés, des innovations récentes vont venir modifier et ajuster l’idée initiale. Ce point de bascule, appelé pivot, est déterminant dans le succès à plus long terme de la jeune entreprise.
Osons donc retourner notre esprit, flâner sur la route, bifurquer, contempler l’horizon, improviser, s’inspirer mutuellement pour atteindre la pleine expression de nos potentialités au-delà d’un objectif prédéfini et limité.
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